Section I : De la forme des donations entre vifs
Article 931
Tous actes portant donation entre vifs seront passés devant
notaires,
dans la forme ordinaire des contrats ; et il en restera minute, sous peine
de nullité.
Article 932
La donation entre vifs n'engagera le donateur, et ne produira
aucun
effet, que du jour qu'elle aura été acceptée en termes expres.
L'acceptation pourra etre faite du vivant du donateur, par un
acte
postérieur et authentique, dont il restera minute ; mais alors la donation
n'aura d'effet, a l'égard du donateur, que du jour ou l'acte qui constatera
cette acceptation lui aura été notifié.
Article 933
Si le donataire est majeur, l'acceptation doit etre faite par
lui, ou, en
son nom, par la personne fondée de sa procuration, portant pouvoir
d'accepter la donation faite, ou un pouvoir général d'accepter les donations
qui auraient été ou qui pourraient etre faites.
Cette procuration devra etre passée devant notaires ; et une expédition
devra en etre annexée a la minute de la donation, a la minute de
l'acceptation qui serait faite par acte séparé.
Article 935
(Loi n° 64-1230 du 14 décembre 1964 art. 2 Journal Officiel du 15 décembre
1964)
La donation faite a un mineur non émancipé ou a un majeur en
tutelle
devra etre acceptée par son tuteur, conformément a l'article 463, au titre
De la minorité, de la tutelle et de l'émancipation.
Néanmoins, les pere et mere du mineur non émancipé, ou les
autres
ascendants, meme du vivant des pere et mere, quoiqu'ils ne soient pas
tuteurs du mineur, pourront accepter pour lui.
Article 936
Le sourd-muet qui saura écrire, pourra accepter lui-meme ou par
un fondé
de pouvoir.
S'il ne sait pas écrire, l'acceptation doit etre faite par un
curateur
nommé a cet effet, suivant les regles établies au titre De la minorité, de
la tutelle et de l'émancipation.
Article 937
Les donations faites au profit d'hospices, des pauvres d'une
commune ou
d'établissements d'utilité publique, seront acceptées par les
administrateurs de ces communes ou établissements, apres y avoir été dument
autorisés.
Article 938
La donation dument acceptée sera parfaite par le seul
consentement des
parties ; et la propriété des objets donnés sera transférée au donataire,
sans qu'il soit besoin d'autre tradition.
Article 939
(Ordonnance n° 59-71 du 7 janvier 1959 art. 25 Journal Officiel du 8 janvier
1959)
Lorsqu'il y aura donation de biens susceptibles d'hypotheques, la
publication des actes contenant la donation et l'acceptation, ainsi que la
notification de l'acceptation, qui aurait eu lieu par acte séparé, devra
etre faite aux bureaux des hypotheques dans l'arrondissement desquels les
biens sont situés.
Article 940
(Ordonnance n° 59-71 du 7 janvier 1959 art. 25 Journal Officiel du 8 janvier
1959)
(Loi n° 65-570 du 13 juillet 1965 art. 4 Journal Officiel du 14 juillet 1965
en vigueur le 1er février 1966)
(Loi n° 85-1372 du 23 décembre 1985 art. 48 Journal Officiel du 26 décembre
1985 en vigueur le 1er juillet 1986)
Lorsque la donation sera faite a des mineurs, a des majeurs en
tutelle,
ou a des établissements publics, la publication sera faite a la diligence
des tuteurs, curateurs ou administrateurs.
Article 941
Le défaut de publication pourra etre opposé par toutes
personnes ayant
intéret, excepté toutefois celles qui sont chargées de faire faire la
publication, ou leurs ayants cause, et le donateur.
Article 942
(Ordonnance n° 59-71 du 7 janvier 1959 art. 25 Journal Officiel du 8 janvier
1959)
(Loi n° 85-1372 du 23 décembre 1985 art. 49 Journal Officiel du 26 décembre
1985 en vigueur le 1er juillet 1986)
Les mineurs, les majeurs en tutelle, ne seront point restitués
contre le
défaut d'acceptation ou de publication des donations ; sauf leur recours
contre leurs tuteurs, s'il y échet, et sans que la restitution puisse avoir
lieu, dans le cas meme ou lesdits tuteurs se trouveraient insolvables.
Article 943
La donation entre vifs ne pourra comprendre que les biens présents
du
donateur ; si elle comprend des biens a venir, elle sera nulle a cet égard.
Article 944
Toute donation entre vifs faite sous des conditions dont l'exécution
dépend de la seule volonté du donateur, sera nulle.
Article 945
Elle sera pareillement nulle si elle a été faite sous la
condition
d'acquitter d'autres dettes ou charges que celles qui existaient a l'époque
de la donation, ou qui seraient exprimées, soit dans l'acte de donation,
soit dans l'état qui devrait y etre annexé.
Article 946
En cas que le donateur se soit réservé la liberté de disposer
d'un effet
compris dans la donation, ou d'une somme fixe sur les biens donnés, s'il
meurt sans en avoir disposé, ledit effet ou ladite somme appartiendra aux
héritiers du donateur, nonobstant toutes clauses et stipulations a ce
contraires.
Article 947
Les quatre articles précédents ne s'appliquent point aux
donations dont
est mention aux chapitres VIII et IX du présent titre.
Article 948
Tout acte de donation d'effets mobiliers ne sera valable que pour
les
effets dont un état estimatif, signé du donateur et du donataire, ou de ceux
qui acceptent pour lui, aura été annexé a la minute de la donation.
Article 949
Il est permis au donateur de faire la réserve a son profit ou de
disposer
au profit d'un autre, de la jouissance ou de l'usufruit des biens meubles ou
immeubles donnés.
Article 950
Lorsque la donation d'effets mobiliers aura été faite avec réserve
d'usufruit, le donataire sera tenu, a l'expiration de l'usufruit, de prendre
les effets donnés qui se trouveront en nature, dans l'état ou il seront ; et
il aura action contre le donateur ou ses héritiers pour raison des objets
non existants, jusqu'a concurrence de la valeur qui leur aura été donnée
dans l'état estimatif.
Article 951
Le donateur pourra stipuler le droit de retour des objets donnés,
soit
pour le cas du prédéces du donataire seul, soit pour le cas du prédéces du
donataire et de ses descendants.
Ce droit ne pourra etre stipulé qu'au profit du donateur seul.
Article 952
L'effet du droit de retour sera de résoudre toutes les aliénations
des
biens donnés, et de faire revenir ces biens au donateur, francs et quittes
de toutes charges et hypotheques, sauf néanmoins l'hypotheque de la dot et
des conventions matrimoniales, si les autres biens de l'époux donataire ne
suffisent pas, et dans le cas seulement ou la donation lui aura été faite
par le meme contrat de mariage duquel résultent ces droits et hypotheques.
Section II : Des exceptions a la regle de l'irrévocabilité des donations
entre vifs
Article 953
La donation entre vifs ne pourra etre révoquée que pour cause
d'inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite, pour
cause
d'ingratitude, et pour cause de survenance d'enfants.
Article 954
Dans le cas de la révocation pour cause d'inexécution des
conditions, les
biens rentreront dans les mains du donateur, libres de toutes charges et
hypotheques du chef du donataire ; et le donateur aura, contre les tiers
détenteurs des immeubles donnés, tous les droits qu'il aurait contre le
donataire lui-meme.
Article 955
La donation entre vifs ne pourra etre révoquée pour cause
d'ingratitude
que dans les cas suivants :
1° Si le donataire a attenté a la vie du donateur ;
2° S'il s'est rendu coupable envers lui de sévices, délits ou
injures
graves ;
3° S'il lui refuse des aliments.
Article 956
La révocation pour cause d'inexécution des conditions, ou pour
cause
d'ingratitude, n'aura jamais lieu de plein droit.
Article 957
La demande en révocation pour cause d'ingratitude devra etre
formée dans
l'année, a compter du jour du délit imputé par le donateur au donataire, ou
du jour que le délit aura pu etre connu par le donateur.
Cette révocation ne pourra etre demandée par le donateur contre
les
héritiers du donataire, ni par les héritiers du donateur contre le
donataire, a moins que, dans ce dernier cas, l'action n'ait été intentée
par
le donateur, ou qu'il ne soit décédé dans l'année du délit.
Article 958
(Ordonnance n° 59-71 du 7 janvier 1959 art. 1 Journal Officiel du 8 janvier
1959)
La révocation pour cause d'ingratitude ne préjudiciera ni aux
aliénations
faites par le donataire, ni aux hypotheques et autres charges réelles qu'il
aura pu imposer sur l'objet de la donation, pourvu que le tout soit
antérieur a la publication, au bureau des hypotheques de la situation des
biens, de la demande en révocation.
Dans le cas de révocation, le donataire sera condamné a
restituer la
valeur des objets aliénés, eu égard au temps de la demande, et les fruits,
a
compter du jour de cette demande.
Article 959
Les donations en faveur de mariage ne seront pas révocables pour
cause
d'ingratitude.
Article 960
Toutes donations entre vifs faites par personnes qui n'avaient
point
d'enfants ou de descendants actuellement vivants dans le temps de la
donation, de quelque valeur que ces donations puissent etre, et a quelque
titre qu'elles aient été faites, et encore qu'elles fussent mutuelles ou
rémunératoires, meme celles qui auraient été faites en faveur de mariage
par
autres que par les ascendants aux conjoints, ou par les conjoints l'un a
l'autre, demeureront révoquées de plein droit par la survenance d'un enfant
légitime du donateur, meme d'un posthume, ou par la légitimation d'un enfant
naturel par mariage subséquent, s'il est né depuis la donation.
Article 961
Cette révocation aura lieu, encore que l'enfant du donateur ou
de la
donatrice fut conçu au temps de la donation.
Article 962
La donation demeurera pareillement révoquée lors meme que le
donataire
serait entré en possession des biens donnés, et qu'il y aurait été laissé
par le donateur depuis la survenance de l'enfant ; sans néanmoins que le
donataire soit tenu de restituer les fruits par lui perçus, de quelque
nature qu'ils soient, si ce n'est du jour que la naissance de l'enfant ou sa
légitimation par mariage subséquent lui aura été notifiée par exploit ou
autre acte en bonne forme ; et ce, quand meme la demande pour rentrer dans
les biens donnés n'aurait été formée que postérieurement a cette
notification.
Article 963
Les biens compris dans la donation révoquée de plein droit,
rentreront
dans le patrimoine du donateur, libres de toutes charges et hypotheques du
chef du donataire, sans qu'ils puissent demeurer affectés, meme
subsidiairement, a la restitution de la dot de la femme de ce donataire, de
ses reprises ou autres conventions matrimoniales ; ce qui aura lieu quand
meme la donation aurait été faite en faveur du mariage du donataire et
insérée dans le contrat, et que le donateur se serait obligé comme caution,
par la donation, a l'exécution du contrat de mariage.
Article 964
Les donations ainsi révoquées ne pourront revivre ou avoir de
nouveau
leur effet, ni par la mort de l'enfant du donateur, ni par aucun acte
confirmatif ; et si le donateur veut donner les memes biens au meme
donataire, soit avant ou apres la mort de l'enfant par la naissance duquel
la donation avait été révoquée, il ne le pourra faire que par une nouvelle
disposition.
Article 965
Toute clause ou convention par laquelle le donateur aurait renoncé
a la
révocation de la donation pour survenance d'enfant, sera regardée comme
nulle et ne pourra produire aucun effet.
Article 966
Le donataire, ses héritiers ou ayants cause, ou autres détenteurs
des
choses données, ne pourront opposer la prescription pour faire valoir la
donation révoquée par la survenance d'enfant, qu'apres une possession de
trente années, qui ne pourront commencer a courir que du jour de la
naissance du dernier enfant du donateur, meme posthume ; et ce, sans
préjudice des interruptions, telles que de droit.